Parution Juillet 2016


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Jacques Chauviré
Les Drapeaux
aux frontières


Récit

2016. 112 p. 13/17.
ISBN 978.2.86853.620.4

10,00 €

Le livre

On sait que Jacques Chauviré avait détruit plusieurs de ses manuscrits, après qu’ils eurent été refusés par la maison Gallimard. Tel n’a pas été le cas d’un volumineux roman, Les drapeaux aux frontières, retrouvé intact après sa disparition, à peine corrigé de sa main et sans doute composé dans les années 50, dont nous donnons ici les trois premiers chapitres. Pour commémorer, avec retard, le centième anniversaire de sa naissance et associer ainsi son souvenir, pour la vingt-cinquième édition, à ce festival de «Lettres sur cour» qui lui avait réservé un accueil chaleureux. Les lecteurs assidus de son œuvre (nombreux, même s’ils sont souvent aussi discrets que l’auteur lui-même) y retrouveront en un tableau mouvant, d’une fidélité absolue au réel, dirait-on, et foisonnant comme lui, des patronymes familiers, des ritournelles d’époque, l’ombre portée d’une mère (accrue de celle d’un père absent) et un domaine traversé d’eaux courantes près de la Saône tutélaire — en même temps qu’on y voit, dans le climat passionné de l’avant-guerre, le protagoniste s’employer à devenir, de façon indissociable, le médecin et l’écrivain que Jacques Chauviré n’aura donc cessé d’être.
(Gilles Ortlieb)



L’auteur


Jacques Chauviré est né en 1915 près de Lyon où il a fait ses études. Il a été médecin généraliste pendant quarante ans à Neuville-sur-Saône où il est mort en 2005. En littérature, il fut l’ami de Jean Reverzy (qui avait été son condisciple), de Claude Roy et d’Albert Camus (qui fit publier en 1958 son premier livre, Partage de la soif — réédité en 2000 par Le Dilettante. Auteur de quatre autres romans publiés initialement par Gallimard : Les passants (réédité en 2001 par Le Dilettante), La confession d’hiver (réédité par Le temps qu’il fait en 2007), Passage des émigrants (réédité en 2003 par Le Dilettante), Les mouettes sur la Saône (réédité en 2004 par Le temps qu’il fait), et de deux recueils de nouvelles : Rurales (avec des illustrations de Jacques Truphémus, Maison du Livre de Pérouges, 1983) et Fins de journées (Le Dilettante, 1990). Ses autres livres (Élisa, 2003, Journal d’un médecin de campagne, 2004, Massacre en septembre, 2006, ainsi que Fils et mère, 2014), publiés par nos éditions, étaient inédits.



Extrait


J’achèverai mon internat dans six mois. Je crois que ma nomination à ce concours de septembre 1934 fut la plus grande joie que j’aie connue jusqu’ici dans ma vie. Ce succès couronnait trois années de travail, au cours de veilles prolongées. Je dois une grande reconnaissance à Pierre Gerdil. Nous avons préparé le concours ensemble. Sa volonté ne m’a jamais permis de relâcher mon effort. J’ai pu apprécier alors la clarté de son esprit et ses dons d’exposition. Gerdil, mon ami, aux cheveux roux, aux yeux noisettes, distingué quel que fût son vêtement !
Je me souviens de ce soir pluvieux où dans une salle de ce même Hôtel-Dieu, où j’écris, furent proclamés les résultats. La scène ressemblait un peu à un verdict de cour d’Assise. La salle où avait délibéré le jury était austère. Les hautes boiseries des murs, l’antique plafond voûté, l’apparat de la table en fer à cheval recouverte d’un tapis vert, les juges écoutant debout la lecture de la liste des élus, les familles, les curieux, les internes entassés dans le hall en une assemblée mouvante composaient un tableau qui me laissa longtemps une impression singulière, voisine du malaise.
Moi, Brice Leblond, j’étais reçu douzième, Pierre Gerdil deuxième. Vingt noms en tout sur deux cents candidats. Parmi eux, Francoz, Tavant, De Chanaleille, Duparc, Arnaud, Duquesnel, Gardien, Piéron. Les autres m’étaient presque inconnus. J’allais être cependant être appelé à partager avec eux la vie communautaire de la salle de garde et du réfectoire.
Depuis, Piéron est mort. Mort, bêtement. D’une septicémie à la suite d’une blessure qu’il s’était faite à un doigt en incisant un panaris.
Dès la proclamation des résultats, j’avais fendu la foule en poussant Gerdil aux épaules. Nous nous étions arrêtés sous les arcades du cloître.
— Touche, touche, lui avais-je crié en me pinçant la main, c’est de la «peau d’interne !»

Cette plaquette, à tirage très limité (mais à petit prix), n’est pas distribuée en librairie; elle est disponible uniquement chez l’éditeur qui en assure la rareté.