Parution Mai 2024


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Ibrahim Khashan
La vie sous
les bombardements


Récits, traduits de l’arabe
par
Samia Mallié
et Gérard Blot

2024. 112 p. 14/19.
ISBN 978.2.86853.721.8

16,00 €

Le livre

Au lendemain du massacre du 7 octobre et dès les premiers jours d’une riposte impitoyable dans la bande de Gaza, Ibrahim Khashan, infatigable militant pour la paix et la justice en Palestine et dans le monde, commence à écrire de brefs et puissants récits de vie sous le feu de l’armée israélienne. Ces courtes chroniques nous peignent sans emphase ni misérabilisme le quotidien tragique du peuple gazaoui. Pour autant, elles ne sont pas exemptes d’une certaine poésie, car l’homme, au-delà de ses engagements, est écrivain, poète et conteur.
[…]
Comment un homme, nécessairement abattu par l’atrocité de la guerre et contraint par la peur, trouve-t-il en lui les ressources pour mettre en forme tous les trois ou quatre jours le récit sans retouche apparente d’une scène vue ou vécue, loin de tout discours institutionnel ou médiatique, presque sans psychologie, ni colère ?
Qu’est-ce qui le pousse à faire assidûment le constat concret, matériel, objectif, de faits ordinaires survenus dans l’extraordinaire de la guerre, à nommer les lieux et les personnes les plus humbles, enfants, femmes et pauvres gens — ceux qui semblent ordinairement le moins destinés à entrer dans la mémoire du monde ?Sans doute Ibrahim Khashan sait-il qu’il incombe aux écrivains de rédiger l’histoire qui manque cruellement à son pays ; sans doute pense-t-il, avec Silvia Moresi, que « la littérature est la seule histoire possible de la Palestine ». On peut se réjouir qu’ainsi c’est une histoire moins officielle, plus diverse et complexe, qui se constituera.


L’auteur

Ibrahim Khashan, né en 1956, est issu d’une famille de la minorité arabe des bédouins palestiniens.
Il a été un responsable à Gaza de l’UNRWA (United Nation Relief and Works Agency for Palestine Refugees in the Near East). Retraité, il a également présidé l’Association pour le Développement Humain (HUDA) dans le petit village d’Al Qarara au sud de Gaza, avant de passer le flambeau à sa fille Salam. Hormis un bref recueil de contes, édité en version bilingue, par le Collectif Solidarité Al Qarara (Saint-Pierre d’Aurillac, Gironde), La vie sous les bombardements est son premier livre publié.



Extraits

3. — Najwa

Le bombardement s’intensifie, il y a des nuages de fumée et de poussière, des pierres et des morceaux de fer projetés dans toutes les directions, le bruit du verre brisé, des morceaux de bois et des morceaux de corps partout qui ont rendu méconnaissable la rue et ses environs. Najwa et sa nombreuse famille ont fui vers le centre-ville. Après la fatigue de la journée, ils se sont installés au deuxième étage. Bruit, cris et chaos dans les lieux. Najwa a évacué en serrant sa petite fille dans ses bras. Deux heures plus tard, elle s’est enfuie à cause d’une fausse alerte, répétée deux fois en trois jours. Ils ont finalement décidé de rentrer chez eux au village après quatre jours de fuite sans but.


5. — Saber

Il s’aventure souvent du lieu de refuge jusqu’à l’abri de ses moutons, de chemin en chemin, de ruelle en ruelle pour rejoindre ses trois brebis afin de les abreuver et de les nourrir. Il les regarde manger alors que le rugissement des avions ne cesse pas et que les bombardements s’abattent un peu partout. Il les a observées en leur disant adieu. Il ne les reverra peut-être plus. Il sourit et se demande : « Qui mourra en premier, moi ou mes moutons ? Peut-être que nous survivrons, et que la vie sera longue pour eux et pour moi. Alors, je les mènerai paître et je chanterai les chants de la vie des matins de ma jeunesse. »


9. — L’ami Abou Al-Abd

À deux heures du matin, ils sautent hors de leur lit, effrayés. De la fumée et de la poussière, et de petits éclats de pierre jaillissent comme des balles autour d’eux. L’explosion est violente. Les murs vacillent comme lors d’un tremblement de terre, des morceaux de fenêtres tombent. Du bruit et des cris retentissent dans toutes les directions. Abou Kamal crie, demandant à tout le monde de se calmer. Un groupe de femmes s’est réfugié derrière un mur épais, craignant qu’un autre missile ne soit lancé, alors que le rugissement des avions est partout. Saeed déclare : « C’est la maison d’Abou
Nawfal. » Alaa s’est rendu sur le site de l’explosion. La maison n’était qu’un amas de gravats. L’odeur de la poudre à canon emplissait l’espace. Les ambulanciers ont transporté les blessés et mis de côté les martyrs. Il n’y a pas de temps pour les mots ou les larmes. Sauf pour Abou Al-Abd : sa langue n’a pas cessé de prier jusqu’à ce que sa voix se brise. Puis il a continué à marmonner, ses larmes ruisselant comme une pluie, devant le corps de son ami Nawaf démembré et couvert de sang.

En souscription
jusqu’au 1 mai 2024